Né en 2007 dans le scepticisme général, le streaming a ressuscité un marché musical donné pour mort au début des années 2000. Ce nouveau mode de consommation légal a totalement changé la donne pour les chanteurs-compositeurs, de leur rémunération à la manière de créer. Enquête au long cours sur un sujet sensible qui véhicule beaucoup de clichés.

L’Américain Lil Pump. Ses titres courts sont parfaits pour les nouveaux modes d’écoute. (©Steven Ferdman/REX//SIPA)
Séquence vue à la Philharmonie de Paris, le 11 novembre dernier. À peine sorti de scène, un Etienne Daho tout émoustillé par la version euphorisante de Get Off My Case qu’il vient d’interpréter avec les Comateens discute avec un responsable de son label. Est évoquée la possibilité de ressortir ce titre survolté en un « feat » – la dénomination moderne du duo – qui pourrait gagner une nouvelle vie en streaming et séduire une audience qui n’était pas née en 1983, à la sortie du tube dance du groupe new-yorkais. Le chanteur doute : « Ca ne marche que pour le rap, non ? »Les rappeurs, grands vainqueurs de la révolution du streaming ? S’en tenir là serait réducteur. Car ce nouveau mode de consommation légal, né il y a douze ans malgré le scepticisme du milieu, a réalisé l’exploit de ressusciter tout un marché donné pour mort dans les années 2000 .
« C’est la réinvention la plus cruciale de la musique depuis le gramophone et la radio », s’exclame le journaliste Sophian Fanen, qui a retracé l’épopée de ce secteur ô combien chahuté dans Boulevard du stream : du MP3 à Deezer, la musique libérée (éd. Castor Astral). Le nouveau modèle économique, basé sur les abonnements payants et non un système gratuit financé par la publicité, a démontré sa pérennité : voilà quatre ans que le marché mondial de la musique enregistrée progresse grâce au streaming – seulement trois en France -, certes sans retrouver les sommets du début des années 2000.
Les rappeurs trustent les écoutes
Pour autant, tous les artistes et genres n’en profitent pas de la même façon . En France encore plus qu’ailleurs, le streaming a accompagné l’explosion de l’urbain local, cette musique des quartiers et des banlieues si longtemps négligée par les radios et les médias. En 2019, Ninho, PNL, Nekfeu, Jul, Niska ont encore monopolisé les « top écoutes » sur Spotify et Deezer, quand un trio de rappeurs made in France (Gradur, SCH, Gambi) trustait le podium chez Apple Music.
Chez les filles, si la grande gagnante, Angèle, relève plus de la chanson francophone au sens large, sa dauphine, Aya Nakamura, a un profil totalement « urbain » et une base de fans jeunes qui se passent ses singles frénétiquement. Son tube de l’été, Djadja, a été écouté 84,5 millions de fois, bien au-delà du seul Hexagone. Pas nécessaire de savoir ce que signifient « catchana » ou « tchouffer » pour se déhancher sur ce morceau entraînant. Même les danseurs de Madonna le pratiquent à l’entracte de leur spectacle à Las Vegas. À l’inverse d’un Coldplay, encore très dépendant du CD, l’explosive ressortissante d’Aulnay-sous-Bois doit sa jeune carrière au streaming, qui représente 70% des ventes de son album.

Pour Ninho, dont l’album « Destin » a été le disque le plus écouté l’an dernier dans l’Hexagone, le ratio monte même à 88% ! La polarisation est bien plus marquée dans les « charts » en France qu’aux Etats-Unis. Selon le site Alpha Data Music, outre-Atlantique le streaming s’étend aussi à la pop, au rock et à l’inaltérable country. La palme de la chanson du xxe siècle la plus streamée au monde ne revient pas à un tube de rap mais à Bohemian Rhapsody, qui a connu une deuxième jeunesse grâce au biopic sur Queen, quarante-trois ans après sa naissance…
Une prime aux artistes prolifiques
Bien qu’elles en agacent beaucoup, ces affinités électives entre le streaming et l’urbain n’ont rien d’étonnant. Alors que Francis Cabrel ou Jean-Jacques Goldman n’ont rejoint que tardivement – et à contrecoeur – la longue liste des convertis (Taylor Swift , Prince, AC/DC, les ayants droit des Beatles, etc.), « ce sont les rappeurs qui ont, les premiers, embrassé de manière proactive le changement de mode de consommation, souligne Romain Vivien, le dynamique directeur général du label indépendant en pointe Believe, qui présidera vendredi prochain les Victoires de la Musique. Ils l’ont fait de la plus intelligente des manières, en produisant et prenant la parole à un rythme soutenu pour activer, développer et impliquer en permanence leur communauté. » Idéal pour remonter dans les algorithmes, très favorables aux artistes prolifiques qui interagissent souvent avec leur importante base de fans…

Dans ce contexte, Jul, avec ses seize albums en cinq ans (rééditions incluses), l’emporte forcément sur un Alain Souchon ou un Francis Cabrel, aux sorties très espacées. Avec des productions bourrées de singles potentiels, les rappeurs maximisent leurs chances de doper les écoutes et de décrocher les précieuses certifications (disques d’or, de platine, etc.). Ils tirent au mieux parti d’un système qui favorise les entrées fulgurantes dans le Top 200 avec des « tracks » nombreux, courts et accrocheurs, en radio comme en streaming – une écoute de moins de trente secondes n’y est pas monétisée.
Des singles de deux minutes
L’époque n’est plus aux intros à rallonge. Un titre de Lil Pump dure à peine deux minutes et son mantra est martelé dès les premières secondes – loin des atmosphériques prolégomènes du fameux Where the Streets Have No Name de U2. « Dès qu’il a une mélodie et deux accords, Jul balance le son. Il ne s’encombre pas de modulations ou d’arrangements, se fiche de savoir si la caisse claire lui plaît ! », constate l’auteur-compositeur-interprète Da Silva, qui vient de sortir son septième album solo, « Au revoir chagrin », tout en travaillant pour Soprano ou Jenifer.
Les révélations du rap lui semblent souvent, toutefois, des étoiles filantes aux tubes éphémères, avec lesquelles le public entretient « un flirt plutôt qu’une histoire d’amour ». « Aucun artiste de rap depuis Diam’s n’a vendu l’équivalent d’un million d’albums », rappelle également Olivier Nusse, président du SNEP (le Syndicat national de l’édition musicale), par ailleurs patron d’Universal Music France.

Ce qui n’empêche pas les rois du streaming, quel que soit leur genre, de remplir l’AccorHotels Arena ou le Zénith. Deuxième artiste le plus écouté de la décennie sur Spotify, derrière Drake, Ed Sheeran reconnaît qu’il ne jouerait pas à guichets fermés en Amérique du Sud et en Asie du Sud-Est sans la plateforme suédoise. Le chanteur anglais peut se targuer d’avoir entonné le titre le plus streamé des années 2010, Shape of You (2,3 milliards d’écoutes), qui à lui seul lui aurait rapporté plus de 10 millions de dollars, juste sur Spotify.
Idem pour Petit Biscuit. Cet ado rouennais a, après le bac, vécu un conte de fées avec Sunset Lover . Ce titre qu’il avait initialement posté sur YouTube a été « travaillé pendant deux années non-stop » par son distributeur, Believe, de manière à le mettre en avant sur les plateformes audio. Intégrée dans les bonnes playlists, françaises puis américaines, la jeune star de l’électro s’est créé une vraie communauté de fans et a converti son carton d’audience en une tournée américaine avant même d’enregistrer un album. L’aventure s’est achevée, en 2018, au festival de Coachella aux côtés de Beyoncé !
« Il y a des sous dans la musique »
Pour autant, un gros coup sur les plateformes n’est pas une condition pour y faire son trou durablement. « Ofenbach a réalisé sur la durée des scores supérieurs à beaucoup de rappeurs. ‘Be Mine’ a été écouté 200 millions de fois sur Spotify alors que le titre n’est jamais entré dans le Top 10 streaming », raconte l’enthousiaste manager du groupe, Tommy Gin, qui ne peut que se réjouir de la manne que constitue le streaming pour « sa génération qui a grandi avec l’idée qu’il n’y avait plus de sous dans la musique ». Si les Parisiens d’Ofenbach sont nés avec ce système qui sert leurs intérêts, leurs aînés sont nettement plus déstabilisés. « Dans le modèle du CD, on était dans la vente à l’acte, alors qu’aujourd’hui, on paye un service », analyse Vincent Frèrebeau, patron du label indépendant Tôt ou Tard.
Lui qui produit Vincent Delerm, encore majoritairement vendu en physique, comme Vianney, dont la popularité s’exprime aussi dans les streams, fait beaucoup d’efforts pour rassurer ses artistes : « Aussi longtemps qu’un consommateur écoutera leur chanson, il la rémunérera. À long terme, la rentabilité est protégée. » Pour Stéphane Le Tavernier, l’ex-patron historique de Sony Music France qui a quitté ses fonctions le mois dernier, le cas est entendu : « Les artistes qui ont des standards ne peuvent qu’être gagnants. Le streaming est fait pour un Jean-Jacques Goldman qui, même s’il ne sort pas de nouveautés, a derrière lui une carrière longue parsemée de ces chansons qu’on écoutera toute une vie. »
Drake, qui a fait ses débuts en 2006, fait désormais partie de cette catégorie. L’an dernier, le Canadien a été le deuxième artiste le plus streamé aux Etats-Unis (6,35 milliards de fois), et si on n’a pas d’information sur ses revenus de 2019, certains estiment qu’en 2018 il a touché au total 17 millions de dollars des différentes plateformes. La même année, Beyoncé aurait perçu autour de 4 millions de dollars.
Des revenus étalés dans le temps
Un changement de logiciel radical pour la génération habituée à ne scruter que ses ventes physiques. Comme l’écrit Sophian Fanen : « Quand un CD ou un téléchargement générait une très large partie de ses revenus les deux premières semaines, le streaming impose un temps beaucoup plus distendu […]. Il faut des années pour construire un tapis de revenus qui commence à peine à prendre forme chez beaucoup d’artistes. »
Intarissable sur ce sujet sensible, Thierry Chassagne, le patron de Warner Music France, le résume à sa façon : « Autrefois, un artiste sortait un album puis partait en tournée, ce qui l’occupait pendant dix-huit mois. Jusqu’à son nouveau disque, un an et demi plus tard, il ne percevait souvent aucunes royalties ! » Aujourd’hui, au contraire, le streaming assure à ceux qui savent gérer leur audience une ressource faible (voir encadré p. 15) mais régulière, qu’il faut calculer sur plusieurs années alors que, à l’ère du CD, 80% des revenus étaient réalisés sur les deux premières années.
New Soul de Yael Naim – sorti en 2007 à l’heure où le pionnier, Deezer, finalisait ses premiers accords légaux – peut ainsi se prévaloir de 110 millions de streams, dopé par son utilisation par Apple dans la publicité du MacBook Air. Certains artistes ont très bien compris les avantages du nouveau système. Julien Doré est passé maître dans l’art d’animer sa communauté, notamment via ses tweets inimitables. De quoi lui éviter le trou d’air dont souffrent de nombreux représentants de sa génération. Il vend autant en streaming qu’en physique, sauf à la sortie de ses albums, où les CD l’emportent.
Le pouvoir des « synchros »
La rencontre entre un artiste et le public prend souvent des chemins détournés. Rien de plus facile que d’identifier sur Shazam un titre entendu dans une publicité, une série ou un magasin et de l’intégrer à sa bibliothèque. Combien d’artistes ont ainsi été découverts par de vastes audiences via leur « synchro » pour de grandes marques, du Makeba de Jaïn choisi par Levi’s au Come Out and Play de Billie Eilish, retenu par Apple ?

Depuis, la jeune prodige californienne de 18 ans est devenue un phénomène, raflant cinq Grammy Awards fin janvier. D’après le magazine Billboard, elle a engrangé plus de 8 millions de dollars grâce à ses streams sur les quatre premiers mois de 2019 – loin encore d’Ariana Grande, en tête des écoutes au début de l’an dernier, ce qui lui aurait valu d’empocher plus de 12 millions de dollars sur la même période.
Quelle ne fut pas la surprise de Da Silva lorsque, chargé de réaliser l’album des derniers candidats en lice de Nouvelle Star, il les a invités à dévoiler leurs playlists personnelles : « Du Jay-Z et du Rihanna, mais aussi des morceaux des années 1960. »« Les jeunes actuels sont beaucoup plus ouverts que ceux de ma génération, se réjouit le chanteur de L’Indécision. Nous avions sans doute une connaissance plus approfondie des discographies mais ni autant de curiosité ni de moyens pour découvrir d’autres styles. La génération née avec Internet visite le passé beaucoup plus en profondeur. »
Des millions de titres sur un smartphone
L’épaisseur des catalogues des plateformes, qui ont payé au prix fort les joyaux des majors, le permet. Avec une offre allant de 35 millions de morceaux chez Spotify à 60 millions chez Apple Music, « on a accès quand et où on veut à l’inventaire quasi-complet d’un artiste pour 9,99 euros par mois, rappelle Thomas Duglet, en charge d’Amazon Music pour la France, l’Italie et l’Espagne. La mauvaise qualité du son, jadis ultra-compressé pour compenser la faible capacité de stockage des appareils, sera bientôt un mauvais souvenir. »
Sa plateforme, qui talonne désormais Apple Music avec 55 millions d’abonnés, propose même sur quatre marchés une offre HD garantissant une qualité digne d’un CD sans compression ni perte – Neil Young, longtemps réfractaire au streaming, s’est dit conquis !
Se placer dans les playlists influentes
Si produire de la musique enregistrée n’a jamais été aussi facile, c’est la faire exister qui se révèle problématique. Comment émerger face à des dizaines de milliers d’artistes sur des sites où chacun est en concurrence directe avec toute l’histoire de la musique ? Les responsables de l’éditorial des plateformes jouent un rôle tel que les labels redoublent d’efforts pour leur « pitcher » leurs artistes.
« Hier, on négociait avec la Fnac ou Leclerc pour obtenir un prix vert, de la publicité sur le lieu de vente ou une vignette album dans un catalogue, se souvient Romain Vivien, qui a notamment travaillé chez EMI avant de rejoindre Believe. Aujourd’hui, même si ce travail avec le monde physique se poursuit, on tente aussi de persuader les plateformes d’intégrer nos artistes dans les playlists influentes, d’afficher leurs visuels, de s’associer au marketing et à la promotion des projets. »

Bien placer un « track » est devenu le nerf de la guerre. Tommy Gin s’en est convaincu avec Ofenbach et son autre poulain électro Feder : « L’idéal est de voir un titre exposé sur une playlist d’entrée comme la New Music Friday de Spotify puis sur une liste intermédiaire comme les Future Hits avant de terminer sur les très exposées Hits du Moment en France ou Swag ! en Allemagne. » Et on peut toujours rêver de se retrouver sur le Today’s Top Hits ou le Rap Caviar de Spotify, qui ont le pouvoir de lancer une carrière !
Des contrats top secret
Maintenant que le streaming a prouvé la viabilité de son modèle économique, des voix s’élèvent pour améliorer son fonctionnement. Le principe de répartition initié par Deezer en 2007 dans ses négociations avec la Sacem et les labels s’est, depuis, généralisé aux autres acteurs. « Nous reversons 70% de notre chiffre d’affaires hors taxes aux ayants droit : là-dessus, 80% vont aux auteurs, compositeurs et producteurs et 20% aux éditeurs », précise le patron France, Alexis de Gemini.
Si la manière dont les éditeurs répartissent ensuite l’argent, régie par la Sacem, est transparente (un tiers à l’éditeur, un tiers au compositeur, un tiers à l’auteur), la part obtenue par les producteurs redescend de façon variable vers les artistes. Tout dépend du pouvoir de négociation de ces derniers avec leur label et du type d’accord signé, contrat d’artiste traditionnel ou de distribution. Un territoire top secret : « Contrairement à ce qui se passe dans le foot, les accords dans la musique sont confidentiels », rappelle Thierry Chassagne.
Le mode de répartition en place provoque un virulent débat. Depuis douze ans, c’est le système du « market share centric », adopté à l’origine pour des raisons pratiques, qui prévaut sur la quasi-totalité des plateformes. Un artiste est rémunéré à hauteur de sa part de marché globale. « Qu’un artiste soit joué en boucle par les 13-25 ans qui ont le plus de temps à consacrer au streaming et il rafle les revenus globaux grâce à son volume d’écoutes », dénonce Alexis de Gemini.
Le « user centric », la croisade de Deezer
À l’heure actuelle, le système profite surtout au rap . Tant pis pour la diversité. Deezer, qui milite depuis deux ans pour une réforme, a mis en ligne un calculateur permettant à chaque abonné de comprendre à qui va son argent. Malaise garanti lorsque l’on s’aperçoit que 98% d’un prélèvement mensuel part chez des artistes qu’on n’a jamais écoutés ! Le simulateur permet aussi de visualiser ce qui changerait avec le modèle « user centric » – basé sur les écoutes individuelles – préconisé par la société française. Si le système pouvait techniquement être mis en place – ce dont doutent certains acteurs – l’argent de bien des quinquas serait sans doute redirigé du rap vers la pop ou le rock…

La croisade de Deezer, nouvelle licorne bien placée dans l’Hexagone mais distancée à l’étranger, est loin d’être gagnée. Les labels indépendants français y sont globalement favorables mais les majors demeurent plus divisées, tiraillées entre deux logiques antagoniques. « Elles ont beaucoup investi dans le rap mais ont aussi des labels de niche (jazz, classique) qui ont du mal à se rémunérer dans le système actuel », décrypte Sophian Fanen.
Thierry Chassagne résume bien l’état d’esprit des grandes maisons : « Le streaming est encore très jeune. Avant de changer de système, il faudrait avoir une vraie étude sur les chiffres afin d’apprécier le bien-fondé de la réforme. » C’est au niveau mondial que les jeux se feront. « La France a un rôle à jouer, estime Vincent Frèrebeau. On est un pays de râleurs mais ce n’est pas forcément mauvais. Notre contestation peut attirer l’oreille des autres territoires ! »
Chiffres clés
En France, en 2018 :
5,5 millions d’abonnés payants au streaming audio (+1 million en un an).
Le streaming représente 51% des ventes de musique enregistrée en France.
Les abonnements payants au streaming audio ont généré 243 millions d’euros de chiffre d’affaires, contre 200 millions pour les CD.
2018 a été la troisième année consécutive de hausse du marché de la musique enregistrée, avec +1,8%. Le chiffre d’affaires global est de 590 millions d’euros (à comparer au record de 2002 : 1,432 milliard).
Source : SNEP.
Aux Etats-Unis :
Le streaming représente 82% des ventes de musique enregistrée (au premier trimestre 2019).
Les revenus du streaming ont atteint 5,4 milliards de dollars en 2019 (+14% sur un an).
Sources : Nielsen Music, RIAA.
Les plateformes les plus rémunératrices
Rémunération moyenne, pour 1 000 écoutes, en dollars
1. Napster : 19
2. Tidal : 12,5
3. Apple Music : 7,35
4. Deezer : 6,40
5. Spotify : 4,37
6. Amazon : 4,02.
Selon les chiffres calculés début 2019 par Digital Music News – qui fait autorité malgré des critiques sur sa méthode -, les « petits » sites payent généralement mieux que les gros. Beaucoup de facteurs expliquent ces différences : l’évolution du volume de streams des clients de chaque service, le prix de l’abonnement. Un Spotify qui multiplie les offres commerciales pour recruter le maximum d’abonnés (packs famille, tarifs étudiants, abonnements gratuits à l’essai) fait mécaniquement baisser son taux de rémunération.
Les data au service des artistes
Le streaming permet aux plateformes de récolter un grand nombre de données : performance de chaque titre, bien sûr, mais aussi sexe, âge, localisation des auditeurs. Ces informations complémentaires à celles récupérées sur les réseaux sociaux sont transmises aux artistes, soit par l’intermédiaire de leur label soit directement via des services créés à leur intention : Spotify For Artists, Apple Music for Artists, Deezer Backstage. Metallica s’en sert par exemple pour définir une setlist qui réponde aux attentes des fans en concert. D’autres s’inspirent de la géographie de leur public pour planifier leur tournée ou imaginer des opérations spéciales pour leurs « superfans ». Observer la performance des différents titres d’un album déjà sorti peut aussi aider à choisir le bon single. C’est en remarquant le succès de 40% d’Aya Nakamura, notamment sur Apple Music, que Warner a décidé de le pousser en second single après Soldat plutôt que Claqué, auquel était pourtant attachée la chanteuse.
Par Isabelle Lesniak