L’année 2021 restera sans doute dans l’histoire du Havas Village belge comme celle d’un renouveau. Avec d’une part l’arrivée de David Grunewald à la tête de l’agence créative du groupe et de l’autre, la mise en place d’une nouvelle structure de management au sein de son agence média. Pour en parler, nous avons rencontré Hugues Rey, CEO de Havas Media et accessoirement, nouveau président de l’UMA.

« J’hésite encore… Si ma femme apprend que j’ai posé ma candidature, elle me tue », me disait Hugues Rey. C’était l’été et nous évoquions la succession de François Chaudoir à la présidence de l’United Media Agencies (UMA).
Lors de ce lunch, il fut surtout question de la nouvelle structure que venait de mettre en place Havas Media et aussi des 50 ans de la BMMA. Une association qu’il préside depuis trois ans et dont les activités ont fortement évolué ces derniers mois – à l’image de son nouveau branding très réussi, plus pétillant et coloré. Et c’est peu dire que Hugues Rey s’implique fortement à la BMMA. Ceci sans doute expliquant la feinte hésitation précitée : entre la direction de Havas Media, la présidence de la BMMA et ses cours à Solvay, pour n’évoquer que son emploi du temps professionnel, on peut comprendre que son épouse puisse avoir des velléités de meurtre que l’on qualifierait de… passionnel. La passion étant sans doute l’autre grande caractéristique de cet insouciant insomniaque, boulimique de travail, de culture, de sport, de médias et de pub.
Nous nous sommes revus quelques mois plus tard, chez Havas cette fois, de manière plus formelle pour cette interview. Hugues Rey était devenu entre temps président de l’UMA et… plus en vie que jamais.
L’un des défis liés aux enseignements de vos études Meaningful Brands est celui de la valeur ajoutée que les agences médias peuvent apporter aux marques pour sortir de la guerre du quantitatif au rabais. Parvenez-vous à embarquer vos clients à ce niveau ?
C’est un point crucial ! Démontrer notre valeur ajoutée, la valoriser hors des modèles traditionnels de rémunération. Oui, les annonceurs sont de plus en plus à l’écoute, mais il y a encore un travail didactique assez logique car cette approche demande de la compréhension mutuelle. D’autant que la pression sur les prix reste une des composantes clefs des discussions que nous avons avec nos clients.
Le procurement est là en amont de ces discussions ou est-il présent durant tout le processus ?
Cela dépend, mais il serait beaucoup plus simple qu’il soient présents durant toute la relation, cela leur permettrait de vraiment comprendre ce qui se passe. Certains annonceurs ont très bien intégré leur procurement, nous avons de bonnes discussions avec eux car ils prennent le temps d’essayer de comprendre, et au plus ils le font au mieux cela se passe. Notre job, plus précisément dans le chef du management des agences, est de pouvoir leur expliquer notre valeur ajoutée. Sachant que nous devons aussi la rendre tout-à-fait tangible. Nous nous y activons tous les jours, mais il peut toujours y avoir des incompréhensions. Dans ce contexte, la réflexion que l’on peut avoir à l’UMA autour de la transparence est évidemment importante.
Que recouvre plus précisément cette notion de valeur ajoutée dont parlent toutes les agences ?
Créer de la valeur ajoutée c’est renforcer la valeur des marques donc les rendre incontournables dans un monde ou les consommateurs disent pouvoir s’en passer. Économiquement, créer de la valeur ajoutée que l’on peut monétiser, c’est une idée de développement de modèle vertueux et selon moi, c’est l’avenir de la publicité. Prenez l’exemple de la durabilité : il ne suffit pas de dire que l’on va moins polluer simplement en essayant d’atténuer certains excès. Ce qu’il faut faire, c’est arrêter de faire des choses inutiles. Il y a un parallélisme évident entre cette notion de gaspillage et celle de nos business modèles liés au volume… Je pense que le jour où l’on arrêtera de diffuser trop de mauvaises publicités et de créer toujours plus d’espaces médias pour encore ajouter de la pub – ce qui est souvent la règle -, tout redeviendra vertueux, et le consommateur sera plus attentif à la pub.
Nos études Meaningful Brands le martèlent : les gens ont de grosses attentes par rapport aux marques, près de 70% le disent. Ils pensent que les marques peuvent faire des choses très utiles, qu’elles peuvent prendre des décisions qui auront plus d’effets que celles de gouvernements. En même temps, 60% de ce qui constitue la communication des marques ne les intéressent pas… Cherchez l’erreur ! J’exerce encore ce métier, parce que je crois qu’il y a moyen de faire de la pub qui intéresse les gens et parce que cela fait partie du modèle économique dans lequel nous évoluons. En s’efforçant de remplacer l’inutile par de l’utile, constructif sur différents axes, comme le divertissement, l’éducation, l’engagement, etc. On ne peut pas continuer à dire qu’il faut toujours acheter plus. Les mois de crise que nous avons vécus, que ce soit sur le plan sanitaire ou le plan climatique, ne nous poussent pas à aller vers du plus, mais vers du mieux. Je pense que notre métier doit aussi évoluer dans ce sens.
On en revient à cette notion de valeur ajoutée : c’est faire en sorte que nos équipes puissent être rémunérées correctement, pour précisément faire ce travail le mieux possible, que ce soit dans des réflexions relatives à la consultance, à la production, à la création ou à la connexion avec le consommateur.
C’est cette approche meaningful qui a guidé votre travail sur la nouvelle structure de l’agence ?
Ces 18 derniers mois ont été intenses : le déploiement de notre méthodologie Mx-Meaningful Experience, la transformation du paysage média et les besoins des clients à légitimement reconsidérer se sont combinés aux nouvelles pratiques hybrides de travail… Il s’est donc passé différentes choses. L’histoire de la meaningfulness et Havas dure depuis plus de 10 ans. Nous sommes sans doute les tous premiers à avoir cité et utilisé cette notion. On retient surtout son fameux wake-up call – le fait que 80% des marques pourraient disparaître sans que cela n’émeuve les consommateurs – et on se souvient souvent peu du corps de l’enseignement de l’étude, qui est le plus intéressant et qui permet de faire évoluer les marques et leurs communications en alignant leurs valeurs, leurs positionnements et leurs ambitions à moyen et long terme. Il y a moyen d’appliquer de manière concrète les résultats de l’étude au fonctionnement d’une agence.
Nous avons donc effectivement fait évoluer la structure de l’agence média autour de quatre piliers : insights & intelligence, gestion clients, stratégies et mesure. Cela nous permet de couvrir un certain nombre de points, à commencer par une transversalité de la donnée. Deuxièmement, cela nous a permis d’évacuer les couches inutiles, d’avoir moins d’intermédiaires – deux au plus entre le CEO et l’équipe ; cela permet d’avoir des “cadres opérationnels”, de maximiser les contacts avec les équipes, les médias et avec les clients. Enfin, nous avons fait en sorte qu’il n’y ait plus d’un côté le buying et de l’autre le planning. Il existe une autre façon d’organiser les choses. Cela a une influence intéressante : dans la réflexion sur l’insight et l’intelligence, la meaningfulness est recherchée partout.
Lorsque nous faisons une proposition de “meaningfulness idea” ou de “meaningful experience” en termes de média, sur l’ensemble des canaux qui servent à construire ces stratégies, nous avons des indicateurs dédiés. Par exemple en télévision, on parle du MRP pour Meaningful Rating Point : à côté des indicateurs traditionnels, toujours nécessaires, on peut également disposer d’autres indicateurs qui montrent comment le consommateur apprécie les programmes dans lesquels est diffusée la communication. Par exemple le nombre de fois où un même consommateur va voir une émission, le nombre de fois où il va revoir un épisode d’une série, le niveau de zapping… Le genre de choses qui permettent de requalifier le média, et cela vaut aussi pour le monde digital. En résumé, nous avons infusé la meaningfulness de façon extrêmement pragmatique, sans séparer les gens qui la pensent et ceux qui l’appliquent.
Autre point important : pendant tout un temps nous nous sommes très fort renforcés en intelligence, mais cela restait complexe de traduire ce que l’on savait en termes d’intelligence dans la mise en place au quotidien des campagnes – spots, affiches, etc. Parce que les outils et les process se devaient d’être complétement implémentés et appliqués. Nous avons amélioré la cohérence du processus, nous avons adapté la structure de l’agence en fonction de l’intégration de cette approche meaningfullness et de la création d’indicateurs dédiés pour nos clients.
Vous avez aussi mis en place de nouvelles structures. La plus récente est OOHavas, en lieu et place de votre partenariat avec Posterscope… C’est assez rare pour une agence média d’intégrer l’OOH.
Nous y pensions depuis longtemps et nous avons estimé que c’était le bon moment. Comme nous maîtrisons l’ensemble des médias audiovisuels et digitaux, c’était à nos yeux dans les bonnes pratiques de l’intégrer. Du reste, nous assistons à une transformation extrêmement positive de ce canal, à la fois rapide et digitale. Nous ne sommes pas loin de nous dire que nos experts du trading desk vont un jour opérer sur de l’affichage également.
Dans cette réflexion, il y a aussi la notion d’omni-canal, l’importance d’être encore présent dans la vie réelle des gens. Avoir cette espèce d’îlot à part, ne nous semblait pas être la meilleure option sur le long terme. Sur le court terme nous avons aussi la chance de collaborer depuis deux ans avec une personne très experte, Valérie De Coster, qui a développé l’aspect stratégique en affichage et qui a elle-même constitué son équipe.
Vous avez par ailleurs donné plus d’importance au social…
Nous faisons du social chez Havas depuis 2011, et ce business s’est plutôt bien développé. Jusqu’à récemment une partie des activités était liée à la création, l’autre au média. Nous avons trouvé plus intéressant de tout regrouper, avec un objectif clair : renforcer ce que peut apporter le Village Havas en créant une entité qui profite à la fois à la création et au média, mais qui d’autre part est magnifiée par la création et le média, On trouve très peu d’entités sociales très bonnes à la fois dans leurs dimensions media et création, qui font en outre partie d’un grand groupe. C’est ce que nous avons voulu mettre en place, et c’est encadré par un stratège issu du monde social. En gros, nous combinons toutes les forces.
C’était à la fois un besoin légitime et une belle porte de réflexion sur la manière de construire du business à l’avenir. Parce que Havas Social peut à la fois nous servir vivre de façon autonome. On peut aller chercher de beaux clients au travers de cette structure, parce qu’elle est plus soutenue, plus capitalisée et qu’elle dispose de meilleurs outils que de petites entités indépendantes.
J’en reviens au Village. Cela va faire quatre ans que les deux agences sont réunies. Nous avons deux portes d’entrée – création et média -, et un certain nombre d’entités spécialisées, accessibles aux deux agences et accessibles à d’autres, qui permettent au Village d’exister de plus en plus. Un exemple concret : en tant qu’agence média, nous n’avions pas développé d’expertises digitales en termes de production, ce que le Village nous permet de proposer, en nous appuyant sur les équipes de l’agence créa. C’est également le cas pour le Content. Nous avons une très bonne équipe au niveau média, qui pense les relations avec les médias, et en même temps, nous avons quelqu’un de très compétent au niveau de l’agence créa, qui va nous aider à améliorer la ligne, à la définir, à la produire. De plus en plus aussi, que le pitch soit créa ou média, on suggère à l’autre de participer au moins à la réflexion, pour voir ce qu’il peut apporter de plus. Cela se fait de plus en plus, et de plus en plus facilement.
Le positionnement Meaningfulness, c’est Havas dans sa globalité. Dans les changements structurels, l’intelligence au niveau média est devenue l’intelligence au niveau Village avec Mathias Beke aux commandes. De son côté, Ann Voorspoels est aujourd’hui en charge du new bizz et du développement d’activités de type new bizz au niveau du Village. Cela fait que les gens travaillent de mieux en mieux ensemble. Sans compter que coté créa, David Grunewald a repris les commandes ; nous nous connaissons très bien et nous avons un réel plaisir à travailler ensemble ! De ce fait, en un an, nous avons gagné de façon très conséquente sur la qualité de ce que nous produisons dans les pitchs. Grâce à cette capacité à aller chercher de la ressource et de la réflexion sur l’ensemble du groupe.
On parle beaucoup d’écosystème, mais en réalité très peu de groupes arrivent à couvrir l’ensemble des activités. Par contre, le corollaire c’est choisir les activités dans lesquelles on se doit d’exceller et être capable de coordonner, au travers de séniorité et d’outils d’intégration.
On a déjà dû vous poser mille fois la question, mais n’est-ce pas simplement un retour à ce qu’étaient les agences avant l’apparition des agences médias ?
Havas Media n’est pas un département de Havas Creative. Et même si c’était le cas, où serait le problème ? Ce qui est le plus intéressant c’est que, grâce au Village, nous sommes capables de couvrir davantage d’activités et de les faire travailler ensemble de manière efficiente et efficace… Alors oui, le concept est sans doute assez proche de ce que faisaient les agences avant mon entrée dans le métier. A une grosse nuance près : aujourd’hui l’univers des médias est infiniment plus développé qu’il ne l’était à l’époque. Auparavant le média en agence, c’était quelques personnes, et un directeur média qui était souvent l’un des directeurs de l’agence.
C’est vrai que dans Mad Men, la personne qui s’occupe des médias est toujours toute seule dans son bureau…
Et ce n’est pas l’endroit le plus souvent montré dans la série. Ce n’était pas là que cela se passait (rire).
Qu’en est-il de Havas Market ?
Havas Market est un point de développement pour fin 2021, début 2022. L’idée est d’accompagner les annonceurs dans l’e-commerce et par extension répondre à une réflexion de plus en plus présente quant à l’évolution des canaux de vente directe par rapport aux canaux de vente traditionnels. Cette période Covid a fait exploser l’e-commerce qui a pris neuf ans d’avance sur les prévisions les plus optimistes ! Différents piliers au sein de groupe nous permettent d’apporter des réponses à ce niveau. Qu’il s’agisse du travail sur le contenu qui doit être utilisé pour travailler cette approche direct consumer, de l’utilisation des médias ou de la réflexion stratégique.
Nous sommes très bien outillés pour l’analyse, pour réaliser des analyses de maturité de marché, de maturité d’annonceur, pour indiquer où réside un potentiel. Et enfin, nous avons des équipes qui peuvent réaliser énormément de travail sur la data. A priori toute cette activité est liée au média, mais, à nouveau, dans l’aspect Village, elle est accessible à l’ensemble des clients, sans limitation. Cette offre existe déjà au niveau du groupe dans 13 pays. Nous bénéficions donc déjà d’une expérience forte.
Pourquoi vous-êtes-vous présenté à la présidence de l’UMA ?
Je pense que c’était le bon moment. Le travail qui a été effectué à l’UMA ces dernières années est admirable. Je pense qu’il y a une grande différence ce qu’était l’association à ses débuts il y a 12 ans et celle d’aujourd’hui. L’UMA fonctionne bien, elle produit beaucoup de choses et je veux continuer dans cette direction.
Je crois qu’aujourd’hui il faut pouvoir faire ensemble un certain nombre de choses. Nous parlions de changement de business model, de paradigme, de vertu… Il faut que l’UMA reste un moteur de propositions. La notion de dialogue est ultra importante. Les espaces de dialogue ont un peu bougé. L’UBA, l’ACC…Tous nos partenaires ont continué à avancer dans ce sens, et l’UMA doit renforcer cette dynamique.
Y a-t-il des axes spécifiques que vous souhaitez développer ?
Les axes sont relativement clairs. La première chose, c’est de continuer le dialogue. Il y a des dossiers à régler et il est plus simple de le faire avec le moins de dissonances possibles au niveau des voix du marché.
La deuxième chose, c’est l’importance cruciale des talents. C’était le point numéro des discussions lors du changement de présidence. Nous devons continuer à recruter les meilleures personnes. C’est essentiel, nous ne pourrons pas mieux faire ce métier s’il n’y a pas plus de talents. Et quand je dis mieux faire, c’est à tous les niveaux. Si nous voulons produire de la valeur, cela ne se fera qu’au travers de talents supplémentaires.
Troisième chose : les pratiques commerciales, les pratiques du métier doivent continuer à être abordées, notamment au travers du dialogue avec l’UBA. Il s’agit aussi des pratiques au niveau de la mesure. Le sujet n’a pas vraiment été abordé, mais cela restera un défi.
Et un dernier point, à première vue anecdotique mais important, et qui a sans doute manqué à ce métier pendant les 24 derniers mois, c’est réintroduire un peu de plaisir. L’une des décisions prises avant mon arrivée à la présidence a été de transformer l’UMA Day en UMA Night… Si ce marché veut être fier de ce qu’il fait, il doit aussi être heureux. Il faut que les gens puissent se voir et partager. “Si j’avais 20 ans aujourd’hui, serais-je heureux d’évoluer dans un monde où l’on crame autant de ressources ?”En ce qui concerne les talents, on un peu l’impression d’un mercato incessant. Est-ce que cela ne crée pas aussi un déficit par rapport à l’image du métier ?
Effectivement, mais l’important est de promouvoir ce métier. Je ne suis pas sûr qu’un jeune de 20 ans aujourd’hui ait envie d’embrasser la pub. Pourtant le secteur offre une magnifique diversité de métiers, dans des domaines variés qui vont de la création au média, en passant par la gestion de la data, l’analyse, le marketing, la réflexion autour du contenu. Il y a clairement du travail collectif à faire à ce niveau.
Se pose aussi une autre question : si j’avais 20 ans aujourd’hui, serais-je heureux d’évoluer dans un monde où l’on crame autant de ressources ? Si nous ne prenons pas le soin d’expliquer en quoi nous pouvons être responsables, nous allons nous retrouver avec une sorte de distorsion par rapport à l’ensemble de la population.
Je suis partagé sur des notions comme la décroissance ou la croissance raisonnée. Dire que toute l’économie est à jeter, c’est naïf. En revanche, une réflexion s’impose. C’est bien de parler de meaningfullness, mais pour une très grande partie des gens c’est “faire du green” là où d’autres y voient une manière de “s’occuper des minorités”.
Pourtant la façon dont la meaningfulness est construite mérite toute l’attention. Notre étude montre d’une part qu’un produit doit avant tout être fonctionnel. Par ailleurs, il faut qu’il apporte quelque chose d’un point de vue personnel, et c’est 30% de la décision d’achat. Cela peut aller loin : par exemple, quelqu’un se sentira plus écologique dans ses prises de décision s’il achète tel produit, plus valorisé s’il achète telle voiture, etc. Ce sont des dimensions pour lesquelles des marques comme la SNCB, la STIB ou Delhaize ressortent très bien. Ce n’est pas du sociétal, c’est du personnel, qui fait du bien par rapport au monde dans lequel on vit. Il y a bien sûr l’écologie, mais ce n’est qu’un des piliers. Il y a aussi l’éthique, l’économie, notamment l’idée de faire du bien à l’économie locale – c’est l’un des points fondamentaux qui ressort en cette période de crise. Oui, la pub aide à faire vivre tout cela, elle aide l’économie.
Aider les entreprises à mieux communiquer autour des grands enjeux sociétaux… C’est peut-être aussi un argument pour le recrutement de jeunes talents ?
Une marque qui essaie de bien faire son job de manière vertueuse, et qui le raconte bien, va bien vivre sur le long terme, va mieux se vendre. C’est exactement la même histoire. Un certain nombre de nos clients utilisent cette notion de meaningfulness en mettant en perspective leur vision, leur mission, leurs valeurs, en répercutant tout cela sur l’ensemble de l’entreprise. Si cette approche se reflète dans leur communication, par des messages de qualité, en respectant l’écologie, l’éthique, etc., la pub fait vraiment ce qu’elle doit faire.
Finalement nous devons être des nutritionnistes pour les marques. Plutôt que de rajouter encore des ingrédients ou d’augmenter la quantité des aliments, nous pouvons contribuer à rééquilibrer, de manière à ce que ce soit bénéfique tant pour la marque que pour la société au sens large.
Ce qui me permet d’aborder les 50 ans de la BMMA. Ce qu’on oublie souvent, c’est la signification des deux M de BMMA, management et marketing. C’était notre intention lors de la semaine de célébration. En décidant de diffuser l’émission “A vos marques” en TV live sur LN24, devant un vrai public, nous avons avant tout pensé à parler du rôle du management et de l’apport du marketing, en sortant de notre microcosme. La communication n’est pas une activité à part, elle a un impact important sur la façon dont on gère les sociétés, donc sur l’économie. Et c’est précisément, je pense, ce que voulaient exprimer les fondateurs de la BMMA.
Qu’est-ce qui vous a le plus marqué cette année ?
Outre les très belles victoires et la série de deuxièmes places de Wout Van Aert ?
Oui sur le plan professionnel (rire)
En tout début d’année, je me souviens que lors de l’événement Commpass “The Year Ahead”, on a évoqué la fin des cookies, et tout le monde est venu avec son narratif autour de différentes solutions… En réalité, et Google le premier, on s’est rendu compte depuis que ce sera plus compliqué que prévu, et qu’une raisonnable solution de report était bienvenue pour le marché.
L’autre événement marquant, passionnant et significatif, c’est l’investissement de DPG et Rossel dans RTL. C’est significatif, parce que notre étude sur la notion de Meaningful Media montre que pour la toute grande majorité des classes d’âge, le média meaningful par excellence reste la télévision, et de loin. Le meaningful étant dans ce cas ce que je crois, ce dont j’ai envie de parler avec d’autres, ce qui m’inspire… Et c’est passionnant parce que les repreneurs de RTL sont des acteurs locaux, actifs non seulement en Belgique, mais également aux Pays-Bas et en France.
Et en osant un énorme raccourci, ce qui est très frappant, c’est de voir des journaux racheter un groupe TV. Même s’ils font plein d’autres choses, Rossel et DPG se sont construits à partir de la presse écrite. On a souvent annoncé leur mort, mais les journaux ont réussi leur transformation digitale. La télévision est certes en transformation, mais cela reste un média qui fonctionne très efficacement.
Dernière chose, on a moins entendu le “il faut se battre contre les GAFA”. Peut-être parce que notre marché média est en train de trouver des solutions. Les propos du CEO de la VRT, Frédéric Delaplace, lors du Media Date de l’UBA étaient à ce égard extrêmement éclairants lorsqu’il annonçait que 135.000 jeunes Flamands regardent les news sur TikTok. C’est la meilleure façon d’utiliser les GAFA. Plutôt que de se nourrir du conflit, on peut adopter des points de vue plus convergents.